Ni dirigeants ni maîtres ni dieux

La tradition devient sécurité et lorsque l'esprit est sécurisé, il tombe en déclin.

Jiddu Krishnamurti

Nous n'avons pas besoin de dirigeants parce que nous pouvons nous gouverner nous-mêmes. Nous n'avons pas besoin de maîtres parce que nous pouvons nous maîtriser tous seuls. Nous n'avons pas besoin d'un dieu parce que tout est déjà Dieu.

Des problèmes surviennent lorsque nous laissons les autres nous diriger nous ou autrui.

Des problèmes surviennent lorsque nous laissons les autres nous maîtriser nous ou autrui.

Des problèmes surviennent lorsque nous laissons les autres nous imposer Dieu à nous ou à autrui.

Quels problèmes se manifestent ? Ils sont nombreux : violence, viols, coercition, asservissement et exécution forcée en dépit du consentement sont les plus flagrants et caractéristiques.

Lorsque la solution sociétale à un problème est la violence, le viol, la coercition, l'asservissement ou l'exécution forcée, c'est là qu'on comprend à quel point cette société est profondément malsaine. Selon David Graeber, « pour qu'ils fassent ce qui est juste, il faut menacer les gens d'un recours à la force, de pénalités financières ou d'emprisonnement (ou de commandements divins). Nous pouvons nous organiser et nous policer nous-mêmes. En fait, c'est le seul moyen d'y parvenir en maintenant respect et dignité. »

Pour maintenir notre respect et notre dignité en évitant ces problèmes, nous devons apprendre à nous auto-gouverner, à nous maîtriser et comprendre l'implication divine dans le cosmos. Analysons les choses...

Aucune gouvernance hormis l'auto-gouvernance

Étant donné que peu d'hommes disposent d'une sagesse suffisante pour se gouverner eux-mêmes, encore moins se trouvent aptes à diriger les autres.

Edward Abbey

Rebelles. Anticonformistes. Dissidents. Les autonomes adoptent des règles en alignement sain avec les lois universelles (valides) mais enfreignent courageusement celles qui ne le sont pas (non valides).

Partant du principe que les humains sont faillibles, imparfaits et prédisposés à commettre des erreurs, surtout en matière de pouvoir, il va sans dire que faire confiance à un système constitué d'humains exerçant un pouvoir sur les autres est absurde. Au pire, un raisonnement circulaire.

Il doit y avoir des freins et contrepoids. En acceptant notre propre faillibilité, nous sommes plus enclins à éprouver de la compassion envers d'autres êtres faillibles. Mais nous sommes également plus à même de reconnaître la faillibilité pour aider à la corriger.

Des individus faillibles contrôlant le pouvoir de systèmes constitués d'autres individus faillibles est la seule manière d’éviter que le pouvoir au sein desdits systèmes faillibles soit dévoyé. Sans parler de tout corrompre.

Il va donc sans dire qu'essayer de nous gouverner nous-même (en dépit de notre faillibilité personnelle) est bien mieux que de se laisser gouverner par autrui (vu que le pouvoir tend à corrompre). L'aptitude à diriger devient alors une chose que nous enseignons aux autres plutôt qu'une chose que nous nous imposons mutuellement.

Gardez bien en tête que « sans dirigeants » ne veut pas dire « sans règles ». Des règles se mettront toujours en place de manière organique sur le plan social par le biais des mécanismes naturels de freins et contrepoids des autonomes. Selon Peter Kropotkin, « l'anarchisme c'est le soutien mutuel, l'aide mutuelle et la défense mutuelle ».

Dans cet avion en train de s'écraser qu'est notre société malade, les autonomes mettent leur masque à oxygène en premier avant d'aider les autres qui ne sont peut-être pas autant en mesure de le faire. Ainsi, ils montrent la voie par le bon exemple.

Sans maître excepté de soi

Elle n'avait pas peur d'être elle-même. Quand tout le monde lui disait « Sois un agneau » Elle montrait les crocs et se transformait en loup.

Autodidactes. Divergents. La maîtrise de soi concentre l'individu sur ce qu'il peut contrôler au lieu d'essayer de contrôler les autres.

Actuellement, la programmation axée sur la peur et les narratifs ciblant les masses dominent le statut quo. La solution est dans la volonté individuelle de s'écarter du troupeau et de cultiver la maîtrise de soi par une reprogrammation basée sur le courage et des narratifs autonomes qui transcendent le statut quo.

La maîtrise de soi rend obsolète la maîtrise d'autrui. Quand tout le monde aura appris à s'auto-corriger directement, il est plus que probable que ce système s'auto-corrige indirectement. Un système d'individus pratiquant la maîtrise de soi finira par contrebalancer un système corrompu de maîtres et esclaves. C'est simplement en s'attachant à construire un nouvel équilibre en dépit de l'ancien déséquilibre que nous amorcerons ce virage sociétal.

La maîtrise de soi consiste précisément à se focaliser sur un nouvel équilibre en dépit de l'ancien déséquilibre. C'est la pleine acceptation que nous ne pouvons (et ne devrions pas) essayer de contrôler autrui, surtout quand nous peinons déjà à nous contrôler nous-mêmes. Au lieu de cela, nous nous attachons à cultiver la maîtrise de soi, l'auto-correction, l'auto-perfectionnement en faisant fi du paradigme maître-esclave qui nous entoure.

Une stratégie ascendante de direction, c'est quand des individus apprennent la maîtrise d'eux-mêmes. Leurs enseignants sont la Nature, la Douleur, la Validité et les autres individus qui sont parvenus à cette maîtrise d'eux-mêmes. Il s'agit d'une maîtrise d'ancrage partant du bas (racines) pour aller vers le haut (couronne). Une philosophie axée sur la santé, le corps et la Terre.

La maîtrise de soi ascendante obéit à la règle d'or et au principe de non agression tout en instillant le courage de désobéir à toute loi/règle/ordre allant à son encontre. La stratégie ascendante de direction relève de la maîtrise de soi en dépit des maîtres autoproclamés.

Dans le grand ordre des choses, nous sommes indissociables du Cosmos. Le concept d'interdépendance naît de cette indissociabilité. Dans la mesure où nous contrôlons notre mental-corps-esprit, l'étape logique suivante sur la voie de la maîtrise de soi est celle du contrôle de l'interdépendance et de l'interconnectivité.

Pour ne pas succomber à la folie émanant du pouvoir établi, nous devons demeurer des individus autonomes en quête de maîtrise d'eux-mêmes plutôt que des personnes auto-insensibles suivant aveuglément une chaîne d'obéissance qui perpétue la corruption du pouvoir en place.

Comme l'a suggéré Albert Camus, « c'est le rôle de ceux qui pensent (les autonomes) de ne pas se ranger du côté des bourreaux ». Et nous devons dépasser cela et nous apprendre les uns les autres à ne pas être des bourreaux.

Aucun dieu hormis la fusion avec tout ce qui est

Faites que je me tienne à l'écart, toujours, de ceux qui pensent détenir les réponses. Faites que je cherche la compagnie, toujours, de ceux qui disent « Regarde ! » et rient d'émerveillement en s'inclinant.

Mary Oliver

Sceptiques. Hérétiques. Non-croyants. Ceux qui permettent à Dieu d'être « tout » (illimité) ont tendance à douter de tout dieu qui prétend être « quelque chose » (limité).

Tout est déjà Dieu. Toute personne ou presque, qu'elle soit religieuse, spirituelle ou profane, s'accordera probablement avec cela.

Le problème est que trop de gens essaient de s'intimider et de se forcer les uns les autres à accepter un Dieu en particulier par la foi aveugle et l'allégeance. Quand ils sont suffisamment nombreux à nourrir des idéaux divergents de ce qu'est Dieu, cela engendre du conflit, de la violence et même des guerres.

La solution est simplement de laisser « Tout » être Dieu. Toute tentative de forcer « Tout » à devenir « Une chose » devrait être raillée, ridiculisée, tournée en dérision mais également tolérée. Les mécanismes de nivellement culturel sont essentiels au maintien d'un équilibre sain de la société. Surtout lorsqu'il est question de Dieu.

« Aucun dieu hormis la fusion avec tout ce qui est » simplifie l'angoisse existentielle. Au lieu de nous opposer, nous rions. Plutôt que d'enfermer Dieu dans une case limitante, nous lui permettons d'être infini. Plutôt que de décréter que Dieu est « il » ou « elle » ou même sans genre, nous lui permettons simplement d'être Tout ; des quarks aux quasars, des gluons aux galaxies, du microcosme au macrocosme, du Big Bang au Big Crunch et tout ce qui se situe entre.

En permettant à Dieu d'être l'interconnectivité de toutes choses, nous risquons moins d'adopter une attitude défensive à propos de ce qu'il devrait être et sommes plus enclins à nous montrer tolérants de ce qu'il pourrait être. Quand quelqu'un dit que Dieu, c'est le Soleil, nous tendons plus à répondre : « Oui, pourquoi pas ? » Lorsqu'un autre dira que Dieu est un monstre en spaghetti volant ou un Zombie juif ou encore un extraterrestre venu d'une planète d'êtres super intelligents, nous serons plus à même de hausser les épaules en disant « Bien sûr. Si Dieu est tout ce qui est, il est aussi ça. Pourquoi pas ? »

Paradoxalement, nous seront probablement plus tolérants envers les autres en ne croyant pas en un dieu en particulier mais en permettant simplement à Dieu d'être tout ce qui est plutôt qu'en croyant à un dieu en particulier et en essayant de forcer tout le monde à penser comme nous. C'est facile. Nous tendrons davantage à agir avec bienveillance et ouverture en envisageant Dieu comme un moyen plutôt qu'en lui accordant un aspect déterminé pour une fin en soi.

Permettre à Dieu d'être Tout nous sort de notre propre ornière en crucifiant l'ego et en ouvrant ainsi la voie à l'âme. Nous passons de l'état de rouage précaire co-dépendant du mécanisme à celui de force confiante indépendante dans un cosmos interdépendant. En clair, nous devenons une force interdépendante de la nature.

Actuellement, il y a trop de « meneurs » types (religieux ou laïques) qui disent aux gens quoi penser. Nous avons désespérément besoin de davantage de meneurs radicaux (autonomes, dans la maîtrise de soi, des forces interdépendantes de la nature) qui enseignent aux autres comment penser... par eux-mêmes.

Texte original de GARY Z. MCGEE traduit de l'anglais par EY@EL
© La Pensine Mutine. Tous droits réservés. Reproduction interdite.

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