Hotel California

Il y a des chansons comme ça qui marquent à jamais les esprits, survivent à l'épreuve du temps et deviennent des légendes. "Hotel California" est de celles-là. Ce morceau d'anthologie est sans aucun doute le plus connu des Eagles, vendu à 16 millions d'exemplaires rien qu'aux États-Unis, numéro un dans les charts pendant 19 semaines et consacré meilleur disque de l'année, en 1978, par l'industrie du disque américaine.

Hotel California

Sur une grande route sombre au milieu du désert,
Les cheveux agités par un vent frais
D'où s’élevaient de douces effluves de colitas,
Au loin, j'aperçus une lumière chatoyante.
Ma tête devint lourde et ma vue s'obscurcit,
Je dus m'arrêter pour la nuit.

Elle se tenait là, sur le seuil de la porte.
J'entendis la cloche de la mission
Et je me dis :
« Ce pourrait être aussi bien
Le Paradis que l'Enfer ».
Et puis elle alluma une bougie
Et me montra le chemin.
Dans le couloir, il y avait des voix,
Je crus les entendre dire :

« Bienvenue à l'hôtel California,
C'est un si bel endroit
(Un si bel endroit),
Une si belle façade.
Il y a toujours des chambres à l'hôtel California
En toute saison
(En toute saison),
Il sera toujours là. »

Elle a l'esprit corrompu de chez Tiffany,
Et les courbes d'une Mercedes,
Et beaucoup de garçons
Très, très mignons
Qu'elle appelle ses amis.
Il faut les voir danser dans le patio,
Cette douce sueur estivale.
D'aucuns dansent pour se souvenir,
D'autres le font pour oublier.

Alors j'ai sommé le Capitaine :
« Voudriez-vous m'apporter mon vin. »
« Nous n'avons pas disposé d'un tel cru
Depuis 1969 » me dit-il.
Et toujours ces voix lointaines
Qui vous appellent et vous réveillent
Au beau milieu de la nuit
Pour vous dire :

« Bienvenue à l'hôtel California,
C'est un si bel endroit
(Un si bel endroit),
Une si belle façade.
On s'amuse bien à l'hôtel California,
Quelle agréable surprise
(Quelle agréable surprise),
Amenez vos alibis. »

Des miroirs au plafond,
Du champagne rosé bien frappé,
« Nous sommes tous prisonniers ici
De notre propre fait » me dit-elle.
Et dans les chambres du Maître,
Ils se sont réunis pour le festin,
Ils ont beau le poignarder
De leurs couteaux d'acier,
Ils n'arrivent pas à tuer la bête.

La dernière chose dont je me souvienne
Est de m'être rué vers la sortie.
Il fallait que je retrouve le passage
Pour retourner à mon point de départ.

« Détendez-vous » me dit le receptionniste de nuit,
« Nous sommes programmés pour recevoir.
Vous pouvez rendre vos clés à n'importe quelle heure
Mais vous ne pourrez jamais quitter ces lieux ! »

Glenn Frey & Don Henley, 1976

À propos de cette chanson

Au delà de son texte très cinématographique, évoquant bien entendu Hollywood et largement inspiré de la série Twilight Zone, "Hotel California", initialement intitulé "Mexican Reggae", fit et continue à faire couler beaucoup d'encre quant au soi-disant sens caché (ou pas) de ses paroles sujettes à moult interprétations possibles. (Pour ma part, je ne peux m'empêcher de penser au fameux hôtel de luxe hanté du Shining de Kubrick).

Selon les membres du groupe, il serait une référence directe à l'hédonisme et l'auto-complaisance de la culture américaine.  « À la base, cette chanson évoque la face sombre du rêve américain et de tous les excès dans ce pays, une chose sur laquelle nous en connaissons un rayon. » explique Don Henley. « Nous étions tous des gamins issus de la classe moyenne du Midwest. "Hotel California" est notre interprétation de ce qu'est la grande vie à L.A. » (Source)

Je n'entrerai pas dans les détails des interprétations possibles et des prétendues métaphores parce que pour moi, ce texte se comprend au sens littéral, ce qui le rend encore bien plus glauque. Je ne vais pas non plus vous faire un exposé de « complotiste » sur le rôle et les dessous d'Hollywood et de l'industrie du spectacle, le MK Ultra, le projet Monarch, la pédophilie, les esclaves sexuels, la magie noire, les sacrifices humains, etc. Ni comment beaucoup de célébrités et personnalités de pouvoir ont vendu leur âme sciemment ou se sont faites piéger — ou plus horrible encore ont été « vendues » par leur propre famille.

Le premier couplet évoque bien sûr l'attrait des fausses lumières et du glamour qui hypnotisent et envoûtent le narrateur (« Au loin, j'aperçus une lumière chatoyante. Ma tête devint lourde et ma vue s'obscurcit. »). Les effluves de colitas ont un double sens. Il s'agit d'un terme d'argot dans la culture hispanique faisant à la fois référence au cannabis et... aux fesses ! Drogue et luxure, les deux armes favorites pour détourner la kundalini (force de vie) et déconnecter les âmes.

La suite est bourrée de connotations religieuses : mission, paradis, enfer, bougie, chemin. La cloche de la mission fait très certainement référence aux nombreux missionnaires catholiques venus d'Espagne qui furent les premiers à coloniser la Californie. Elle pourrait s'interpréter comme un signe que le protagoniste refuse d'écouter puisqu'il choisit de se laisser montrer le chemin par une fausse prophétesse. Les voix peuvent être le lavage de cerveau qui commence tout comme des incantations. Ne dit-on pas qu'il est malsain d'entendre des voix ?

Le second couplet fait référence à cette mentalité superficielle obnubilée par l'argent, le luxe, le bling-bling (Tiffany, Mercedes) et la luxure. Pourquoi des « garçons très, très mignons » plutôt que des hommes très sexy ? On imagine mal, dans une société aussi machiste, une femme ayant l'équivalent d'un harem. Sauf s'il s'agit de jeunes garçons sous MK Ultra qui luttent pour recouvrer leur volonté ou pour oublier les horreurs qu'on leur a fait et fait subir.

Quant à l'histoire du vin et du cru —  qui m'a semblé la traduction la plus acceptable pour le double sens de spirit  en anglais qui signifie à la fois « alcool spiritueux » et « esprit » même si Don Henley lui-même aurait répondu à un journaliste que cela n'avait pas grand chose à voir avec des boissons alcoolisées mais qu'il s'agissait plutôt un « constat sociopolitique » (l'esprit perdu du rêve américain et la déchéance de l'industrie musicale après Woodstock en 1969) — ne dit-on pas dans la religion catholique que le vin est le sang du Christ et ne parle-t-on pas du Saint-Esprit ? Ce n'est pas si déplacé que cela avec ce qui suit.

Et ces voix qui « vous réveillent au milieu de la nuit » pour vous dire d'« amener vos alibis ». Des alibis pour quoi ? Pour passer louer de pizzas, sans doute ?

Le dernier couplet me fait penser à Eyes Wide Shut, le dernier film ultra glauque de Kubrick. Ils sont tous prisonniers parce que lorsque l'on entre dans le cercle des Illuminati de son plein gré ou parce qu'on vous a piégé pour vous faire chanter — car c'est ainsi que procède l'état profond pour manipuler ses pions et gouverner le monde dans l'ombre — on ne peut plus s'échapper.

Les « chambres du Maître », qui en anglais (chambers) ne désignent pas une chambre où l'on dort mais plutôt une grande salle de réception ou encore une antre secrète (cf. la chambre des secrets dans Harry Potter), et tout ce qui est décrit ensuite me parait un peu too much pour une métaphore poétique du rêve américain (sic). Je ne sais pas mais ça décrit clairement une scène de rite satanique. Même Baudelaire sous emprise de substances illicites et de spleen n'était pas aussi gore dans ses allégories !

Et enfin, les dernières lignes que n'aurait pas reniées Faust : « Vous pouvez rendre vos clés à n'importe quelle heure, mais vous ne pourrez jamais partir ! » Notez aussi le « nous sommes programmés ».

Il est clair que ce texte pourrait parler de tout et n'importe quoi mais aussi de tout ce dont il a l'air de parler (relisez Lewis Carroll sur la manipulation du langage, les double sens et la logique de l'absurde). Bien sûr, comme toujours, on vous montre les choses pour que vous donniez votre consentement parce qu'ils sont obligés de respecter la loi du libre-arbitre. Et puis ces gens ont un énorme complexe de supériorité et s'attendent à ce que vous ne captiez pas. Mais ils ont oublié un détail essentiel : l'intelligence du cœur est un milliard de fois supérieure à celle de l'ego formattable à volonté parce qu'elle est directement reliée à la Source, au Divin... appelez-le comme vous voudrez.

Il n'y a jamais qu'une seule vérité. Il n'y a que des portes qui s'ouvrent et se referment sur des réalités en accord avec vos choix et vos croyances. Il faut juste savoir, cependant, que certaines réalités ne permettent plus d'accéder à d'autres.

Que la lumière soit avec l'humanité. En ce jour plus que jamais.

© La Pensine Mutine. Tous droits réservés. Reproduction interdite.

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