L'utilité des cauchemars

Avec Neptune dominant dans mon thème astrologique, il n'y a rien de bien étonnant à ce que tout ce qui a trait au rêve et aux domaines qui y sont rattachés me fascine depuis toujours (il fut même un temps où je tenais un journal de rêves). Ce qui est surprenant, par contre, est que je n'avais encore jamais publié de billet sur la question. C'est désormais chose faite grâce (comme toujours) à une série de coïncidences démarrée à partir d'une discussion sur un blog. Ayant posé une question à laquelle il me fut répondu par un lien qui n'avait finalement rien à voir avec mes expériences oniriques, je tombai ensuite sur le présent article qui m'apporta, en quelque sorte, la confirmation de ce que je savais déjà intuitivement dans cette petite phrase qui compare ce que l'on qualifie communément de « mauvais rêves » à « de petits films de formation destinés aux guerriers spirituels ».

Mais au fait, qu'est-ce que le rêve — ou plutôt qu'est qu'il n'est pas ? Le rêve n'est pas le produit d'une hallucination ni d'un fantasme, d'une illusion, de l'imagination ou d'une fiction (tous des travestissements de la réalité). C'est une vision, une projection de nous-mêmes, une représentation — une manifestation de ce qui se passe en nous. Il s'exprime de manière condensée afin de transmettre un maximum d'informations en un minimum de temps, ayant pour cela recours au langage universel de l'image dans une approche qui s'apparente aux techniques cinématographiques. Il fait appel à des symboles que l'on nomme « archétypes », souvent présentés sous forme de paraboles ou allégories, suivant une logique qui lui est propre et qui, au réveil, laisse souvent notre mental conditionné fort perplexe. À l'image de la vie humaine, le rêve s'exprime sur trois niveaux qui sont le physique, le psycho/affectif et le spirituel. En psychanalyse, on le considère comme l'expression concentrée de notre situation psychique.

Voilà pour la définition expresse en quelques lignes. De quoi me redonner envie de m'abandonner dans les bras de ce beau gosse de Morphée pourvu qu'il se rappelle à mon bon souvenir au matin, le temps que je couche le récit de nos aventures nocturnes sur les nombreuses pages vierges encore restantes et quelque peu jaunies de mon vieux cahier de rêves trop longtemps délaissé. Enfin, ici, il sera plutôt question de cauchemars. Encore un timing parfait à l'approche d'Halloween.

Ey@el

Chaque fois que l'on se souvient d'un rêve, cela indique que l'esprit en éveil a un rôle créatif de transformation à jouer dans l'évolution du problème exposé, quelle que soit la nature de ce dernier. Depuis des millions d'années, la capacité à prêter une attention immédiate et particulière à tout ce qui est négatif et menaçant constitue le premier test de survie. Ce sont, en général, les créatures qui se concentrent efficacement sur les menaces qui survivent et inversement. Ainsi, la sélection naturelle nous prédispose de manière inhérente à être mis en alerte par les expériences désagréables qui nous inquiètent et nous terrorisent.

Pourquoi les cauchemars sont bénéfiques

Par conséquent, lorsque la source profondément ancrée en nous (d'où émanent tous les rêves de manière spontanée et non sollicitée) a une information potentiellement importante à transmettre à la conscience en éveil, il est fort probable qu'elle la lui présente sous forme de « cauchemar » dans le seul but d'attirer notre attention. Ce qui nous amène à l'un des principes généraux les plus ironiques du travail onirique : plus l'expérience s'avèrera effrayante et angoissante, plus l'ampleur du don potentiel de compréhension et d'énergie créative fournies par le rêve sera considérable.

On appelle communément « cauchemars » ces rêves dont le message générique est « Réveille-toi. Fais attention. C'est ta survie qui est en jeu ! » Il arrive que les problèmes vitaux soulevés par l'activité onirique soient en rapport avec l'état réel de la santé physique. Toutefois, la plupart du temps, il ne s'agit que d'attirer l'attention sur des questions d'authenticité émotionnelle et spirituelle dans la vie du rêveur.

Pourquoi on se souvient des cauchemars

D'expérience, tous les rêves (en particulier les cauchemars) sont au service de la santé et de l'intégralité. Ce qui veut dire qu'aucun, aussi angoissant ou menaçant soit-il, ne viendra jamais vous dire « Tu as tel ou tel problème et tu ne peux rien y faire, tralalère ! » En premier lieu, le fait même que l'on se souvienne d'un rêve indique que le rêveur dispose de tout le courage, la créativité, la force et la sagesse nécessaires pour réagir de manière créative et transformatrice même aux pires « problèmes » qui lui seront présentés. (Si le rêveur n'était pas en possession de toutes les énergies requises pour une réaction positive, créative et transformatrice, il n'aurait tout simplement aucun souvenir de son rêve.) Ceci est vrai non seulement sur le plan de la santé individuelle psycho-spirituelle et de l'intégralité mais également à l'échelle de la société mondiale, de la culture et du combat collectif de l'humanité.

L'ironie veut que, pour cette raison, je me réjouis chaque fois que je fais — ou entends parler d'un rêve impliquant des problèmes relatifs à la planète dans son ensemble comme la destruction de l'environnement, la peste, les conflits militaires ou autres bouleversements sociaux importants. Le fait de nous souvenir de telles expériences oniriques laisse entendre que nous sommes capables de répondre à ces problèmes avec créativité et efficacité tout comme celles qui traitent de questions personnelles apparemment « insolubles » indiquent toujours notre capacité à les gérer. Les cauchemars peuvent également apporter des suggestions symboliques et des sources d'inspiration créatives spécifiques pour peu que nous ayons l'intelligence et la sagesse d'y prêter attention.

Les cauchemars historiques

Toutefois, dans certains cas, les possibilités créatrices spécifiques proposées par le rêve s'avèrent plus compliquées que les problèmes que nous rencontrons dans l'immédiat. Parmi ces expériences oniriques difficiles, il y a ces terribles cauchemars que je qualifie de « pires scénarios ». Cela fait des siècles que les Hindous et les Bouddhistes qui travaillent la question ont compris que les rêves de ce type étaient intimement liés à l'efficacité du développement spirituel du rêveur.

Chose curieuse, John Newton, le compositeur de l'hymne "Amazing Grace", se convertit au christianisme et se transforma en un fervent militant anti-esclavagiste après avoir fait un tel cauchemar. Dans son rêve, alors capitaine d'un navire négrier, il vit « toute l'Europe consumée par un grand incendie dévastateur ».

Les rêves et le développement spirituel

L'une des raisons pour lesquelles les gens qui se consacrent activement à leur développement spirituel ou ceux qui œuvrent à l'échelle mondiale pour soulager la souffrance d'autrui connaissent ce type d'expériences oniriques éprouvantes est parce que le seul endroit où l'on peut véritablement affronter et dominer le mal est à l'intérieur de soi. Ce qui signifie que ceux qui s'emploient sincèrement à essayer de rendre le monde meilleur doivent faire front et vaincre l'ampleur de ce mal s'ils veulent réussir. Plus leur développement spirituel et leur travail de conciliation global seront sincères et efficaces, plus ils seront susceptibles de faire des rêves de pire scénario de cet archétype.

À cet égard, ces derniers constituent de petits « films de formation » destinés aux guerriers spirituels. On peut aussi les envisager comme des « missions de sauvetage » entreprises par la conscience onirique des profondeurs encore non revendiquées de l'ombre archétypale et par le potentiel inachevé de l'inconscient collectif.

Le miroir magique qui ne ment jamais

Au début, il semble toujours que la tâche la plus difficile que doive affronter le rêveur soit de regarder dans le « miroir magique qui ne ment jamais » et d'assumer une plus grande part de responsabilité pour le reflet symbolique de nos faiblesses et nos défaillances. Toutefois, avec le temps, on constate qu'il y a bien plus compliqué encore, à savoir reconnaitre l'ampleur et la portée de notre créativité et de notre aptitude à nous transformer nous-mêmes et notre univers. Les rêves de pire scénario exhortent le rêveur, non seulement à voir et à accepter les profondeurs de la dépravation inhérente à toute psyché humaine, mais surtout à devenir plus conscient et plus responsable de notre capacité à affronter, vaincre, exprimer et transformer, de manière créative et spirituelle, les énergies de cette ombre archétypale.

Texte original de JEREMY TAYLOR traduit de l'anglais par EY@EL
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