L'intemporalité du temps

Ce qu'il y a de fascinant avec la science, c'est que l'on puisse obtenir un si grand rendement conjectural avec si peu d'investissement factuel.

Mark Twain

Le paradigme scientifique qui considérait le monde comme « au dehors » — bien distinct de l'observateur et séparé de tout — vient enfin d'être démantelé par les découvertes de la révolution quantique. Nous savons désormais que ces hypothèses à la vie dure, sur lesquelles repose la majeure partie de notre univers matérialiste, sont fausses. Le monde ne se situe pas uniquement « au dehors ». Il ne s'agit que de la surface, du niveau de manifestation — et sans doute le moindre. Un peu comme si l'univers, le Créateur, Om, Dieu... jouait avec nous parce que nous ne le voyons pas ! À vrai dire, c'est dans l'invisible que réside la « réalité ». Lorsque nous l'omettons (par ignorance), nous créons une division dans nos âmes — et nos corps — qui prendra plusieurs vies à guérir.

La danse dans les artères
La circulation de la lymphe
Apparaissent dans le mouvement des étoiles.

T.S. Eliot

L'étude du temps est intéressante et peut nous aider à percevoir cette division avec davantage de clarté. Pour les matérialistes, il est linéaire — et se déplace par ordre séquentiel du passé au présent puis vers l'avenir. Pour les mystiques, les poètes ou les rêveurs, il représente l'unité, l'éternité, l'infini. Il se produit au moment présent et il en sera toujours ainsi. Deux visions du monde différentes, deux manières de percevoir la réalité. La vérité à propos du temps dépend de celui qui l'observe. Selon la vision newtonienne, c'était simple : il était linéaire un point c'est tout. Einstein fit alors voler en éclats ce réservoir de croyances et lia à jamais le temps et l'espace — en nous faisant prendre conscience qu'en réalité, il est relatif, qu'il s'agit en fait d'un concept. Pourtant les matérialistes continuent de le percevoir dans sa linéarité — tout comme la plupart d'entre nous, à bien des égards, en vaquant à nos activités quotidiennes, contraints que nous sommes de vivre dans une réalité essentiellement matérielle. À moins d'accéder à un portail vers un niveau de conscience différent (par un biais médicamenteux ou spirituel), nous « ressentons » le passage du temps — et il semble de déplacer du passé vers le présent puis vers l'avenir.

Les hommes disent que le temps passe mais pour le temps, ce sont les hommes qui ne font que passer.

Pour les astrologues, la question du temps revêt une importance particulière. Le thème de naissance est dressé pour l'instant précis où l'entité entrante inspire son premier souffle. Comme le fit remarquer Carl Jung à juste titre : « Tout ce qui voit le jour à cet instant précis porte en lui les qualités de ce moment. » Chaque instant possède un caractère particulier, une configuration constituée d'énergies planétaires en provenance du cosmos qui vient marquer l'ADN des nouveaux nés, formant ainsi un modèle spirituel et physique pour son existence à venir. Le moment est donc essentiel pour la connaissance astrologique qui relie de si belle manière le matériel au spirituel. Dès son point d'entrée, défini par l'instant de sa naissance dans le monde matériel, l'individu est placé sur un parcours temporel linéaire. Il pénètre le monde de la séparation, le terrain de jeu de la dualité, le lieu de division. Mais l'Âme et les autres « corps » (émotionnel, mental et supérieur) qui constituent l'entité individuelle résident toujours dans cette autre réalité : l'unité, l'éternité dans laquelle le temps n'existe pas.

Cela peut sembler difficile d'accès, ou peut-être déroutant, mais le thème natal illustre parfaitement l'intersection des conceptions du temps tant la science et la magie se rejoignent dans son symbolisme. La croix de la matière, formée par deux axes vertical et horizontal, crée la division des quatre éléments qui constituent le monde physique tandis que le cercle entourant la croix symbolise le serpent qui se mord la queue — ou encore, l'éternité sans commencement et sans fin. On ne saurait trouver une représentation plus parfaite de l'intégralité que nous incarnons. Nous sommes, en effet, des êtres spirituels faisant l'expérience de l'humanité. La sphère céleste des maisons héberge les planètes — chacune portant en elle un champ d'information unique dont les fréquences interagissent et influent directement sur nos propres champs. Le fait d'exister à l'intérieur de ce cercle leur confère, tout comme à nous, un aspect à la fois délimité dans le temps et un autre, intemporel. Là encore, cela dépend de comment nous les percevons et de l'optique dans laquelle nous observons le temps.

Un thème natal peut s’interpréter correctement — et c'est souvent le cas — dans le contexte de l'incarnation actuelle et du cadre temporel linéaire. Mais il peut être également examiné dans une autre perspective, à savoir celle de l'infini, de l'éternel et de l'intemporel. Par une telle « lecture », tout dans l'horoscope prend une dimension karmique. En clair, cela signifie qu'il est la conséquence d'un événement passé. Nous pouvons percevoir, à travers les planètes, d'anciennes blessures tout comme nous pouvons, en changeant de point de vue, découvrir le potentiel de guérison de ces mêmes astres.

En astrologie évolutive, nous reconnaissons l'existence de l'Âme et croyons qu'elle est intemporelle et infinie. Pour nous, elle porte en elle chaque expérience que nous avons traversée. Ainsi toutes les existences que nous avons vécues sont toujours avec nous. Il n'y a ni passé ni présent ni avenir pour tout ce qui relève de l'Âme. Tout se résume à l'instant présent. L'Âme fait l'expérience de l'humanité dans le présent et cette expérience est inévitablement éclaboussée de manière indélébile par les blessures de la division qui lui ont été infligées à un moment ou un autre au cours de son long périple d'incarnations multiples. Elle porte les meurtrissures du plan physique sous forme de souvenirs emprisonnés dans la structure cellulaire des corps suivants à moins que ceux-ci ne soient ramenés au niveau de la conscience et libérés.

C'est en reconnaissant nos limites que nous accédons à notre plus grande liberté.

Anthony Storr

Il y a les lois spirituelles et celles des hommes — mais aucune ne peut être violée en toute impunité. Notre libre arbitre n'est libre que que dans la mesure où nous reconnaissons que nous ne sommes, en définitive, pas libres. Nous sommes incarnés avec les cicatrices de nos vies antérieures qui existent toujours en nous telles des structures de détention énergétiques. L'horoscope est, en quelque sorte, la carte de ces énergies. Et il y a tant de choses qui dépassent le cadre de notre compréhension actuelle du thème de naissance — et qui dépassent probablement l'astrologie elle-même. Toutefois il met en lumière les lois individuelles qui nous gouvernent dans notre présente incarnation. Il représente, que cela vous plaise ou non, la carte de notre destin. Notre libre arbitre est le pouvoir qui nous a été conféré pour le reconnaitre et travailler avec. Nous pouvons en vouloir à notre destinée mais ne désespérons pas : tout comme les cicatrices physiques, les blessures de l'Âme peuvent guérir. Il est certain que ce n'est pas chose facile car la qualité essentielle à leur guérison est la patience. Nous devons sortir du temps, devenir intemporels. Ce faisant, nos esprits et nos corps deviennent plus souples et nous nous connectons au monde naturel. Nous devenons ouverts, confiants, honnêtes — à l'opposé notre état limité par le temps dans lequel nous nous voyons coincés, fermés, pressés, anxieux et craintifs.

Dans cette brève existence où le temps semble s'accélérer à mesure que nous prenons de l'âge, nous sommes confrontés, en arrière plan, à un sentiment d'urgence et d'affairement. Nous ne réservons ni facilement ni volontiers le temps et la patience nécessaires pour aller au fond de nos problèmes, de nos douleurs et de nos blessures. Nous voulons des solutions rapides et pour cela nous consultons des médecins, des psychologues et des thérapeutes de toutes catégories. On ne nous a pas appris à nous en remettre à l'intelligence de notre corps pour s'auto-guérir. Nous ne savons pas comment nous immobiliser afin d'écouter la sagacité de notre cœur. Nous n'avons pas le temps de nous connecter à la nature. Et dans une culture qui a réprimé la vérité sur la réincarnation, nous n'avons pas la moindre idée des blessures issues de nos vies antérieures que nous apportons avec nous dans la présente ; ni que nos douleurs sont souvent d'anciennes cicatrices toujours vivaces et d'actualité. Certaines prendrons sans doute plus d'une existence à découvrir et à guérir. Le parcours vers la guérison nous est commun à tous et constitue l'une des raisons de nos incarnations.

Il peut être alors utile de sortir de l'idéologie matérialiste afin d'examiner le temps dans l'optique des mystiques. Il n'existe pas. Nous sommes infinis. Quel que soit notre but, nous avons l'éternité devant nous pour l'atteindre. Nous ne devons pas nous décourager même lorsque nous avons la sensation de livrer une rude bataille. Cette lutte fait partie de l'objectif et même si nous avons parfois l'impression de progresser dans la vie en faisant deux pas en avant et un pas en arrière, personne n'échappe à ces défis. Notre souffrance n'a rien d'unique. Nous avons besoin de tout cela : patience, perspicacité, auto-compassion, questionnement, immobilité, confiance et connexion au monde naturel, aux animaux et à nos semblables. Nous devons concevoir notre existence, notre corps, nos défis et nos problèmes comme des expériences. La vie n'est en fait rien d'autre qu'un exercice pratique. Il n'est pas facile de s'en extraire aussi il vaut mieux jouer le jeu. Vivez-là avec le bon, le mauvais et tout ce qui se situe entre.

Et ce faisant, n'oublions pas ce que nous ont appris ceux qui ont vu leur conscience extraite de cette vie pour aller dans l'infini avant d'en revenir — à savoir qu'au-delà de cette existence linéaire, la nature extraordinaire de l'univers, l'endroit où nous irons en quittant ces lieux, est amour à l'état pur.

Si on nettoyait les portes de la perception, tout apparaitrait alors à l'homme tel qu'il est, c'est à dire, infini.

William Blake

Texte original de LINDA GEORGE traduit de l'anglais par EY@EL
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